— Je me suis perdue!! — Ah bon? pourtant tu es rentrée …

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labyrinthe

Mes expériences les plus profondes mais aussi les plus drôles, se sont toujours passées dans des contextes d’une grande banalité apparente. J’ai longtemps eu l’attente romantique de vivre des expériences existentielles spectaculaires. Non, je vis le sacré dans l’ordinaire de ma vie.

Je vais vous conter ma dernière expérience initiatique, celle où je me suis perdue dans la forêt, sans rencontrer le loup, bien au contraire! C’était plutôt un bien bel homme.

Je décide un matin d’aller marcher dans la forêt à coté de chez moi. Je ne la connais pas encore très bien. J’ai cru reconnaître un chemin et me voici embarquée dans une sorte de labyrinthe infernal de chemins qui se croisaient, se recroisaient sans indication. Beaucoup étaient des culs-de-sacs, car cette forêt du Vercors est pleine de falaises à pic. J’ai même eu l’audace, pleine de certitude, de renseigner deux jeunes gens qui cherchaient une paroi d’escalade en les envoyant dans une mauvaise direction! Mais ils ont l’ont trouvée rapidement, faisant fi assez vite de mes indications.

Alors que je commençais à me raconter que j’étais perdue, une vieille angoisse archaïque est montée. Je me suis dit que je n’étais pas perdue puisque j’étais certaine de retrouver un chemin et descendre dans la vallée, peut être un peu loin de mon vélo, mais en terrain connu. J’étais juste en train de beaucoup rallonger mon parcours.

J’ai suivi une flèche qui avait l’air prometteuse et j’ai commencé à monter, monter, monter, au pied d’une falaise inconnue, persuadée qu’au bout de ce chemin qui avait l’air très fréquenté, je trouverais un panneau ou un autre chemin pour descendre.Tous les chemins que j’avais testés jusque là qui descendaient, étaient des impasses . L’adrénaline me faisait monter … je n’avais rien à manger dans mon sac. J’y allais en force, sans rien regarder et sans autre objectif que de rentrer chez moi, tendue sur cet objectif (et assez fière ma foi, de mon endurance).

Arrivée au bout de la falaise, je me suis dit, non, ce n’est pas possible, je vais faire demi-tour et je refais tout en sens inverse (oui, tout le labyrinthe!). Je me suis alors détendue, prête à y passer le temps qu’il fallait et à profiter des belles couleurs de l’automne (vous imaginez bien que jusque là, je ne les avais pas vraiment admirées!). C’est alors, à cet instant précis qu’un ange est apparu. Enfin, un ange, un des plus beaux hommes que j’ai rencontré depuis longtemps. Quelle beauté dans son regard, quelle gentillesse quand il s’est adressé à moi. Il m’a expliqué où j’étais (surpris de me voir sur ce sentier uniquement utilisé par les personnes qui pratiquent l’escalade des falaises) et m’a indiqué le chemin du retour. J’ai alors pris le temps de redescendre, joyeuse (pensez donc, une rencontre pareille, ça met en joie pour un moment). La falaise est magnifique.

Cependant, j’ai encore passé du temps en choisissant un chemin raide et glissant. Je vous laisse imaginer ma descente sur les fesses et mon abandon de ce chemin infâme en m’accrochant aux branches de houx! (j’ai découvert que si les feuilles de houx sont piquantes, leur tige ne l’est pas du tout).

Puis, je suis tombée soudainement sur le chemin habituel, comme si des lutins facétieux l’avaient caché pour me laisser vivre cette expérience!

Alors voilà, je me dis que dans ma vie, je ne me suis jamais perdue. J’ai juste passé du temps crispée en rallongeant les chemins et en testant des impasses. Quand je laisse véritablement aller le contrôle et la peur, je peux déguster le plaisir du parcours, accueillir la magie (l’âme agit) des rencontres et aller bien plus loin!

Même quand vous vous sentez perdu, une partie de vous-même est toujours à votre recherche. (Robert Waterman, cité dans « Le Pardon de soi« )