Aujourd’hui, je partage un témoignage très personnel, que peu de personnes ont lu et qui a suivi mes déménagements d’ordinateur en ordinateur depuis 7 ans. Quand je me suis posé la question du thème de la chronique ornithorynque, c’est ce texte qui m’est apparu.
L’image associée est celle du film Le Livre de La Jungle, quand le Roi Louie pense encore pouvoir empêcher l’écroulement de son palais avec sa seule volonté. Une image qui me vient souvent, dans un grand rire quand je crois pouvoir tout tenir avec mes petits bras et mon mental.
Témoignage :
Janvier 2009 … j’aborde cette nouvelle année sans grand enthousiasme.
Un vague sentiment d’ennui, une ombre de culpabilité d’observer que mon activité professionnelle ne décolle pas suffisamment, une fatigue lancinante à l’idée de faire mes trajets Grenoble-Valgo, un voile de tristesse de travailler seule, un souffle de peur de ne pas être à la hauteur, un soupçon d’angoisse devant mon agenda presque vide, un agacement de ne pas ouvrir les yeux avec joie le matin, un jugement fugace que je ne fais pas ce qu’il faudrait, …
Au fond de moi, pourtant, il y a une grande confiance… toute ma vie jusqu’ici a été parfaite… réussites, piétinements, crises, chagrins, ruptures, rencontres, créations, ratés, harmonies, chaos, rebellions, soumissions, libérations, découvertes, aveuglements, naissances, morts …
Je vis quelques nuits de cauchemars. Je les oublie tous, même s’ils me laissent une sensation angoissante le matin, sauf un. Je suis dans une voiture, sur une route enneigée. Ce n’est pas moi qui conduis, je ne sais plus qui le fait. Un virage au dessus d’un à-pic vertigineux, des arbres dessous. Le conducteur ne prend pas le virage mais va tout droit. Mais tourne donc… non, la voiture part dans le vide. Je ressens intérieurement que je ne contrôle rien. Tout peut s’arrêter dans les secondes qui viennent. A Dieu va… C’est OK pour moi de mourir maintenant, mais je n’ai pas envie de souffrir, d’être blessée à l’arrivée. OK. J’accepte profondément ce qui se passe, avec l’angoisse de l’atterrissage quand même. Réveil. Battements de cœur. Partage avec mon mari.
Le 28 janvier . Journée très active, pleine de promesses. Je me hâte de partir à Gap pour une première rencontre professionnelle. Je suis dans un état fébrile. Je pars vite, j’oublie mon téléphone portable… tant pis.
Roule roule sur la route Napoléon dans ma petite Twingo rouge.
Un virage… sortie de virage, l’arrière de la voiture glisse sur la gauche… Merde… je ne contrôle rien… la voiture cogne quelque chose, je sens qu’elle se retourne, beaucoup de bruit, des vitres qui explosent, des craquements, le noir, et la voiture qui continue à cogner, secouer, un peu comme dans les manèges que j’adorais enfant, les auto-tamponneuses, la grande chenille. Tout peut s’arrêter maintenant. Et si j’étais en train de mourir ? Intérieurement, un grand OUI. Si c’est maintenant, c’est OK. A Dieu va… Et soudain, un grand silence. C’est terminé. Je suis toujours en sécurité, attachée à mon siège. Entière. Comme après ces fameux tours de manège qui me secouaient. OK. Je constate que je suis à l’envers. Calme. Tranquille. Je vois le moteur au dessus de moi. Ah… couper le contact. J’ai vu beaucoup de films où le moteur prenait feu. Ca c’est fait. Maintenant, sortir. Bon… ceinture.. OK, c’est là. Portière… OK, on l’ouvre là. J’ouvre la ceinture… je tombe tranquillement par terre. Ouvrir la porte. Zut… à l’envers, je ne reconnais plus rien… où est l’ouverture … OK, je la vois… je sors à 4 pattes… debout… indemne… je vois quelqu’un venir vers moi … « vous allez bien ? J’appelle les pompiers ? là j’ai les gendarmes en ligne »
« oui oui, je vais bien »…
Je ressens toujours un calme étonnant. Appeler mon mari… une gentille dame me prête son portable. « J’ai fait un tonneau sur la nationale, je vais bien, viens me chercher et apporte moi mon portable ».
Il est très clair pour moi que je dois annuler tous mes rendez-vous des deux jours à venir. Je les ai tous en tête. Je ressens aussi une grande, une immense, une infinie gratitude en voyant l’état de la voiture, son contenu éparpillé un peu partout ( hi hi hi, mon sac à main est au milieu de la route). Gratitude aussi de constater que la voiture, à l’envers et explosée, est gentiment garée sur un renfoncement de la route à droite, juste après le virage.
Elle ne gêne pas la circulation (c’est après que j’ai pensé aux autres scénarii possibles : un camion qui viendrait en face, la voiture en plein milieu à la sortie du virage…).
-Prendre du Rescue… j’en ai toujours avec moi.
-Téléphoner quand mon mari me donne mon portable. Avec grand calme et de façon très professionnelle.
-Prendre du rescue. J’ai envie de pleurer.
-Prendre du rescue. Je veux rentrer chez moi.
-Mais qu’est-ce que j’ai fait ?
Je rentre chez moi après un bref arrêt de contrôle chez le médecin. Il me sera impossible d’aller plus loin que le seuil dans la semaine qui va suivre. Sécurité.
A la seconde où j’ai dérapé sur cette route, je suis entrée dans un processus de transformation profonde. A la seconde où j’ai dérapé sur cette route, j’en ai eu conscience. Pendant l’accident, mon petit moi, attaché dans la voiture vivait l’évènement, et mon grand moi, celui qui avait prévu le scénario, observait de haut. J’ai reçu un coup de pieds au cul cosmique, voilà ce que je me suis dit tout de suite (mon mari, lui, m’a dit, pour te retourner comme ça, tu dois marcher sur la tête). J’ai expérimenté la rencontre avec « l’Ange de la Mort » dont témoigne Miguel Ruiz dans les « 4 accords toltèques »… que je venais de relire pour préparer un atelier.
Je ne suis pas victime de cette plaque de sel glissante. Je ne suis pas coupable d’être sortie peut-être un peu vite du virage.
Je suis en vie. Je me suis reliée à son infinie fragilité, à son infinie force. Je me suis reliée à la Mort et je l’ai acceptée profondément. Je l’aurais presque choisie avec soulagement. Et maintenant…
Méditation … « tu es face à un choix, celui de vivre, pourquoi vis-tu ? »… Monte spontanément la réponse « je vis parce que je le dois. J’ai une mission à accomplir sur Terre. Je dois faire des choses. Je dois être là pour les autres » …
Non… « je dois » ne sonne plus juste… je n’ai plus envie de « devoir vivre »… J’efface cette croyance en utilisant le protocole transmis par Robert Waterman. Je me retrouve face à « je choisis de vivre, je me relie à l’en vie, l’envie »… Et… pffff… c’est un grand vide, une grande angoisse… je ne sais pas faire moi… Ce que je sais faire c’est répondre à ce que je crois être mon devoir, c’est accomplir une mission, c’est faire, faire des efforts et m’attendre dans cette vie ou après, à un jugement scolaire : TB, B, AB, passable, médiocre pour passer dans la classe suivante ou redoubler…
En vie… envie… envie de quoi ? de rien… vide…
J’ai vécu les 4 semaines qui ont suivi dans une forme de déprime. Sans pouvoir me relier à la cause, sans pouvoir la transformer. J’ai vécu chaque minute qui passait de mon mieux, sans rien planifier, en suivant seulement ce qui se présentait à moi.
Puis stage de formation à l’équilibrage de l’aura avec Robert Waterman, premier jour. Je travaille avec un client volontaire que je ne connais pas… miroir… émerge la croyance qu’il n’est « rien ». Robert me guide dans le travail, le guide pour l’amener à se relier au « Grand Rien », divin.
Deuxième jour. Je suis emmenée en voiture sur le lieu du stage. Les routes sont enneigées. La voiture dérape sur la gauche. Toutes les cellules de mon corps revivent l’accident. J’arrive au stage pas bien du tout.
Méditation. Je me sens toujours mal. Et puis zut… j’envoie tout cela «en haut » en demandant à être aidée.
Je vis alors un moment d’intégration, de réintégration, de clarté.
J’accueille dans tous les niveaux de mon corps et de ma conscience les paradoxes de la vie.
- Je ne suis rien et je suis tout.
- Je ne possède rien et j’ai tout.
- Je ne contrôle rien et je fais le scénario.
- Je suis seule et je suis reliée.
- Je ne suis pas qui je crois être et je le suis.
- Tout peut s’arrêter dans la seconde et rien ne s’arrête.
Je comprends alors, ce qui s’est passé pour moi dans les 4 semaines précédentes. Oui, j’ai vécu une vraie déprime. Oui, finalement, je ne savais plus trop si j’avais envie de vivre. C’est mon petit moi, mon « basic-self », mon « corps de souffrance », ma personne, Laurence Aubourg qui a cru : « je ne suis rien », je ne possède rien, je ne contrôle rien, je suis seule, je ne suis pas ce que je crois être, tout peut s’arrêter dans la seconde. Alors, à quoi bon…
J’ai apprivoisé ce nouvel état d’être. Je me suis reliée de nouveau à la joie. Dans ce nouvel espace, il n’y a plus de « mission », de « devoir », de « combat ». Il y a vivre, expérimenter, accueillir ce que la vie me présente, transformer ce qui coupe ma joie et mon énergie et me fait retomber dans le combat intérieur. J’apprivoise. Car ce changement est sidéral. C’est comme réapprendre à marcher.
Se lever le matin avec le sens du devoir, de la mission, ce n’est pas toujours drôle mais c’est connu, sécurisant.
J’expérimente un changement de paradigme. Celui dont je parlais, que je tentais de mettre en action depuis quelque temps déjà. La passivité active et l’activité passive. Mais ça c’est une autre histoire, je pourrai vous en parler plus tard…
La vie est magnifique.
Laurence – mars 2009
Francoise Fumat
Bonjour Laurence, quelle expérience et quel beau témoignage!! Je suis très heureuse que tu t’en sois sortie.. La vie reste un bien extrêmement précieux qu’il faut doucement préserver. Très cordialement. Francoise
anne-marie Julien
Bonjour Laurence. Je suis heureuse pour vous. Je tenais simplement à vous apporter mon témoignage. J’étais dans un état un peu comme le votre, j’avais l’impression que je devais faire ceci, je devais faire cela etc….Beaucoup de « devoir ». Une nuit, une phrase m’est apparue en songe. » Je suis Anne-Marie : je choisis ce que je veux vivre » . J’ai trouvé ça extraordinaire d’avoir le choix et non plus de devoir. Depuis j’essaie d’appliquer cette méthode dans ma vie de tous les jours et j’avoue que c’est beaucoup plus léger, plus joyeux. Le choix et non pas le devoir .Merci pour ce que vous faites, merci d’etre qui vous etes. Amicalement Anne-marie
Solange Eguiguren
Wouahhh! C’est juste bôôôôô!!! Magifique 😉 retournement chère Lo…Merci de témoigner, et me permettre ainsi de « retourner » à mes propres retournements ha! ha! J’en ai la tête qui tourne!:-)